MED-InA in Tunisia supports Hortikos, hydroponics at the service of urban agriculture

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Hortikos Farm

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Pourriez-vous vous présenter brièvement, ainsi que votre projet ?

Notre projet est issu de notre amitié: Ali, qui a étudié l’architecture, puis a fait de la scénographie en freelance, a découvert l’hydroponie grâce à Yassine. Nous nous sommes connus en travaillant ensemble dans le monde de la nuit : Ali est scénographe et Yassine est ingénieur du son et DJ. Ce dernier a travaillé des années en tant que directeur artistique dans plusieurs clubs tunisois, et ne vient pas du monde de l’entrepreneuriat.

Dans le cadre du projet Hortikos, nous ne vendons pas de solutions d’hydroponie, nous nous positionnons en tant qu’agriculteurs urbains et cultivateurs de fruits et légumes. Nos produits sont des barquettes de fruits et légumes, cultivés en hydroponie qui est pour nous un moyen et non une fin. En effet, les systèmes hydroponiques sont souvent inadaptés et mal expliqués : il est complexe de se lancer là-dedans. Nous avons travaillé 3 ans à l’optimisation de nos prototypes pour avoir le meilleur rendement possible, avec les meilleurs matériaux, substrats, engrais possibles et adaptés à l’hydroponie, afin de nous différencier. Ceci étant, l’hydroponie est pour nous le moyen actuel, mais peut-être qu’une technologie future nous permettra d’optimiser encore plus l’agriculture urbaine, auquel cas nous l’adopterons, qu’elle relève de l’hydroponie, de l’aquaponie, de la bioponie, de l’aéroponie…

Comment fonctionne votre plantation en hydroponie actuellement ?

Nous produisons à toute petite échelle chez Yassine, en attendant, après le parcours d’incubation avec le Lab’ess, de trouver un espace plus grand.

Notre prototype est un circuit d’eau fermée ; la plante a besoin de plusieurs facteurs pour vivre : eau, oxygène, engrais, lumière. Techniquement, une plante peut prospérer si elle flotte sur l’eau. Cette technique a été exploitée il y a des millénaires par les Aztèques et les Chinois, avec des plantations flottantes sur les rivières. Concrètement, cela prend la forme d’un bac dans lequel on place une plaque de bois avec des trous, dans lesquels se placent la plante avec les racines dans l’eau. Bien sûr cela implique beaucoup de paramètres scientifiques à respecter : eau, pH, électro-conductivité, oxygénation, température, etc. Si toutes ces variables sont maîtrisées, la plante va prospérer et donner des fruits ou légumes plus rapidement qu’en terre, avec un rendement beaucoup plus élevé.

On vise à automatiser le processus de régulation de quantité d’engrais (engrais solubles dans l’eau), pH de l’eau, température, à travers des cartes électroniques, pour obtenir un système fermé : une boîte noire qu’on branche directement sur panneau photovoltaïque, raccordée à internet pour un monitoring direct. Les cartes vont gérer tous les apports, afin que dès le branchement de la boîte, celle-ci donne automatiquement des fruits et légumes, avec un minimum d’intervention humaine nécessaire. Ce type de concept est en train d’essaimer aux Etats-Unis et en Europe, aidant les populations urbaines à cultiver, dans des containers par exemple, des ressources alimentaires locales, saines, fraîches et accessibles.

*Note : un des lauréats jordaniens, « Ivvest », travaille sur ce concept de boîtes de cultures intelligentes ; portrait à paraître prochainement sur le site MED-InA en version anglaise.

2.       Quand et comment avez-vous eu cette idée ?

Il y a eu un élément déclencheur : lorsqu’Ali a arrêté ses études en 2016, à 25 ans, son père a voulu lui ouvrir l’esprit sur de nouveaux domaines professionnels. C’est ainsi qu’ils sont allés à un salon de l’agiculture, où se déroulait une conférence sur l’hydroponie, et où ils ont croisé Yassine, qui travaillait déjà sur des solutions dans le domaine. Quelques temps plus tard les deux amis en ont reparlé, et après avoir pensé à tenter quelque chose dans la ferme du père d’Ali, ils ont opté pour la culture hors-sol en milieu urbain.

Après avoir postulé à un programme d’incubation pour confectionner des systèmes hydroponiques design pour jardins intérieurs et salons décoratifs, Ali et Yassine se sont mutuellement motivés à dépasser cette échelle limitée et à se lancer dans la conception de serres hydroponiques pour la vente de produits agricoles. En cela, la période de confinement du Covid-19 les a incités à avancer sur le projet Hortikos : comprendre les principes qu’ils ne connaissaient pas, la structure potentielle de leur entreprise, définir leurs valeurs, rechercher des fournisseurs, produire leurs premiers prototypes fiables qui pouvaient donner un rendement, créer un site web (www.hortikos.com), un logo, souder et faire grandir l’équipe…

3.       Comment le bootcamp et l’accompagnement Lab’Ess vous ont-ils aidé(s) dans la préparation du jury de pitching ?

Le bootcamp a permis un recadrage de notre projet dans l’économie circulaire. En effet, nous n’avions pas conçu notre activité selon des canons spécifiques de circularité ou de réutilisation, néanmoins nos principes étaient déjà en concordance avec l’économie circulaire : moins de CO2 rejeté par fruit mangé, distribution à vélo. C’est lorsque nous avons travaillé avec Justine Laurent (circulab - Paris) sur le circular canvas (voir article sur le jury Lab’ess) que nous avons réalisé que nos principes et valeurs étaient en fait ancrés dans l’économie circulaire.

  • Nous allons donc insérer la notion de boucle fermée, à travers un système de livraison hebdomadaire d’un panier tout en récupérant les déchets organiques de la semaine précédente dans le même panier, qui seront transformés en engrais liquide grâce à un processus déjà prototypé par Yassine.
  • Nous allons également ajouter une action de sensibilisation au compostage et à la technique de l’hydroponie, avec l’ambition de créer une véritable ferme urbaine décentralisée composée d’une multitude de petits points de culture.

Le bootcamp nous a sensibilisé au contexte plus large de l’économie circulaire, et on a essayé d’incrémenter ça dans notre projet. C’est donc un projet mis à jour qui a été lauréat du concours !

4.       Comment le prix que vous avez gagné va-t-il aider votre projet, et quelles sont les prochaines étapes ?

Beaucoup de recherche & développement sont nécessaires dans notre projet, et nous avons de nombreux tests à faire sur les systèmes hydroponiques utilisés. Nous sommes quatre dans l’équipe : nous deux ainsi qu’un architecte et un physicien (un ami et le frère de Yassine).

Les prochaines étapes pour Hortikos : le dépôt de la société (aujourd’hui nous avons les papiers du Comité Régional de l'Agriculture), puis l’acquisition d’un terrain à La Marsa (discussions en cours avec la municipalité), suivie d’un mois de chantier, avant lancement de la production, principalement de tomates cerises, basilic, coriandre et œillets d’Inde. Pourquoi ? Parce que ce sont des plantes qui se protègent les unes les autres naturellement contre les insectes, parasites et maladies.

Les cycles sont étudiés pour que la production s’étale dans un roulement qui permette de fournir en continu, avec à terme la production des 10 fruits et légumes les plus consommés en Tunisie. Egalement, Yassine, via son réseau, a accès à un certain nombre de chefs et restaurateurs, qui sont intéressés par ce genre de produit local, biologique, haut de gamme, ce qui est très prometteur, à la fois au niveau qualité gustative et nutritive, mais aussi au niveau communication pour les restaurants comme pour Hortikos.

5.       Qu’attendez-vous de l’incubation Lab’Ess dont vous allez bénéficier ?

Nous ne venons pas de l’entrepreneuriat, donc tout est bon à prendre pour nous : juridique, marketing, études de marché, etc. Le Lab’ess fait un travail incroyable, un accompagnement de tous les jours avec des conseils, des encouragements, des relances : il y a des sessions collectives et des sessions personnalisées, qui nous permettent à la fois de développer des compétences de gestion en interne, et d’évaluer les besoins éventuels de compétences supplémentaires.

6.       Comment voyez-vous votre contribution aux efforts vers moins de déchets et/ou une économie plus circulaire ?

  • A travers l’économie d’eau déjà, la Tunisie étant une zone en stress hydrique.
  • Ensuite à travers le système d’emballage consigné : on livre les fruits et légumes dans une caisse qu’on récupère ensuite.
  • Enfin, avec la contribution à la valorisation des déchets organiques : récupérés dans la caisse rendue par le client, ils serviront à produire de l’engrais liquide pour Hortikos, et le reste, engrais solide, sera vendu et/ou mis à disposition de la Municipalité pour ses jardins publics ,etc.